Lalchimie de la ménopause
par Mona Hébert, homéopathe, naturopathe, herboriste
Pour certaines, cette période se passera sans trop dhistoires tandis que dautres affronteront des tempêtes. Létape de la procréation révolue, le cycle se transforme et libère en nous des énergies créatrices qui ouvrent la porte à une nouvelle forme de fécondité. Ainsi, chaque femme peut renaître et entrer dans son propre pouvoir.
Je suis en ménopause, à l’heure des grandes questionnements. Mes rêves cachés refont surface et livrent de nouveaux aspects de moi-même. C’est un voyage bien au-delà des hormones, un appel intérieur intense qui porte en lui-même son propre itinéraire et les moyens de le réaliser. On essaie de nous faire croire qu’il faut traverser cette période comme si de rien n’était, par la magie d’une simple pilule, alors que la clé est dans l’acceptation de ce changement, le lâcher prise et l’amélioration de son mode de vie. Dans un contexte social où l’on n’honore plus le sens sacré des transformations, où les déesses sont des adolescentes et où l’on cache les vieux, on se demande où sont les conseils de sages, les sociétés secrètes de vieilles femmes qui pourraient nous éclairer sur ce passage.
Le feu intérieur
Les bouffées de chaleur sont la plainte principale des femmes, mais aussi la plus grande métaphore de la ménopause. Elles parlent de cette énergie de feu qui monte en nous. Une énergie sauvage et animale qui peut servir de canal pour libérer sa parole et s’affirmer. C’est une implosion dont on ne balise pas le territoire et qui nous met en face de changements à faire dans nos vies, changements qui, autrement, seraient mis en veilleuse ou réprimés. Les bouffées de chaleur, c’est comme un volcan qui fait éclater nos frontières, un grand accélérateur de conscience. On mue comme le serpent, on brûle sa vieille peau et on se détache de ses peurs pour donner naissance à la femme qu’on a toujours voulu être. Accepter cette métamorphose, c’est vivre toute l’alchimie de la ménopause.
Face à son ombre
On vit bien souvent cette période en solitaire. Il nous faut apprivoiser cette vieille femme qui nous habite de plus en plus, faire face symboliquement à sa propre mort, s’interroger sur le temps à venir. Ce face-à-face avec son ombre est un appel au détachement. Il nous invite à laisser derrière tout ce qui n’est plus nécessaire pour renaître à notre déesse intérieure. C’est un temps où l’on peut vivre des deuils, celui de ses parents, celui de son rôle de mère. Dans ce chant de tristesse, on côtoie sa mort, souvent pour la première fois. Dans la recherche d’une nouvelle identité, on demeure confuse et partagée entre la crainte et la célébration, le découragement et la renaissance. L’expérience de vieillir comme on la connaît a besoin d’une mise à jour.
Rites de passage
Dans certaines cultures ancestrales, la ménopause était vue comme l’atteinte d’un haut niveau d’initiation et de pouvoir. Les femmes mûres étaient souveraines et avaient droit de regard sur toutes les décisions de la tribu. Elles n’avaient pas peur de dire non à tout ce qui ne servait pas la vie. Elles initiaient et éduquaient aussi les plus jeunes femmes au respect des grandes forces vitales. Ce rôle d’influence s’appuyant sur des générations de sagesse féminine, nous pouvons le jouer encore aujourd’hui. Il est primordial de réaliser et d’assumer que nous sommes les gardiennes et les protectrices du monde.
Chez nous, la femme vieillissante se voit de plus en plus confinée à un rôle aliénant. On voit négativement la diminution de production d’oestrogènes, les carences possibles en calcium de notre corps, si bien que la ménopause n’est plus associée qu’à la perte de la féminité. Pourquoi ne fait-on pas confiance au discernement de notre corps? On n’accepte plus ses rythmes biologiques, on veut tout uniformiser. On a peur des processus naturels, des émotions, des désirs. Comme si on ne pouvait pas se fier à des milliers d’années d’expérience de vie féminine et qu’il fallait qu’on vienne nous dire encore comment faire pour assumer la maturité! Je vois tous les jours, dans ma pratique, le prix que les femmes paient à même leur santé pour ce divorce entre l’être et le corps.
L’industrie de la peur
On a fait de la ménopause une maladie menant à la décrépitude. Il ne reste alors d’autre espoir que le recours aux hormones synthétiques miraculeuses. Promesse d’éternelle jeunesse, chantage émotif quant à la capacité de séduction perdue, agitation du spectre de la rose fanée. On a semé la peur chez les femmes! L’opinion médicale nous pousse dans un piège dont la seule issue est pharmaceutique.
Pour Maguy, une de mes patientes, la visite de routine chez sa gynécologue -- une femme de surcroît -- s’est transformée en expérience traumatisante: «Il y a des risques à ne pas suivre de traitement hormonal à partir de la ménopause: cancer du sein, de l’utérus, ostéoporose, dessèchement de la peau, des tissus vaginaux, vieillissement prématuré...».
En Amérique du Nord, 50 millions de femmes seront en ménopause en l’an 2000; une femme sur deux en 2015... Les enjeux économiques sont fabuleux. Les ventes annuelles de Prémarine®, l’hormone synthétique la plus prescrite, frôlent déjà le milliard de dollars. Toute une industrie est mobilisée contre le vieillissement des femmes: géants pharmaceutiques investissant des sommes astronomiques dans la recherche; fabricants d’équipements de plus en plus sophistiqués et, bien sûr, plus coûteux pour des tests (mammographies, radiographies, etc.) de plus en plus pointus; commerçants d’hormones, d’antidépresseurs, de produits de beauté... Les intervenants dans notre santé se multiplient, tous voulant notre bien! Et les médecins contribuent à faire tourner la roue: ce sont eux les premiers dans la chaîne, qui prescrivent tests et médicaments. Mais ils déchantent quand explose la bombe à retardement des effets secondaires de ces médications. Ils ont beau prétendre que les avantages statistiques de l’hormonothérapie en compensent les inconvénients individuels -- mêmes mortels! -- leur cheval de bataille se transforme peu à peu en cheval de Troie... Quelle est l’étape suivante? La femme transgénique?
Devant un tel tableau, de plus en plus de femmes se tournent vers les plantes médicinales pour les soutenir durant leur ménopause. Et comme les compagnies pharmaceutiques ne peuvent faire breveter ces plantes de manière à en conserver le monopole, leur stratégie est de faire breveter des procédés exclusifs d’isolement et de transformation en laboratoire de leurs principes actifs. L’astuce publicitaire consiste à présenter les hormones synthétiques ainsi obtenues comme étant «d’origine naturelle» et à en qualifier les molécules de «bio-identiques» puisqu’elles ont chimiquement la même structure que les hormones féminines. On nous les propose ensuite, assorties d’un suivi médical régulier et d’une multitude de tests à l’appui. On ne mentionne jamais les coûts réels de ce «monitoring hormonal», on ne parle pas du fait qu’il installe une dépendance à vie avec le système médico-pharmaceutique, on ne dit pas qu’il sabote le programme génétique de notre corps en l’amputant artificiellement d’une de ses phases d’évolution essentielles: celle du passage à la maturité.
La libido
En début de ménopause, on observe fréquemment une baisse de la libido et une diminution des sécrétions vaginales. Ces deux phénomènes font écho à notre profond besoin de retrait dans notre grotte intérieure alors que les périodes d’ovulation s’espacent et, avec elles, les pics de désir qui les caractérisaient. Il s’agit d’une phase d’adaptation du corps à une nouvelle réalité. Une fois libérée du souci de la contraception, la libido peut renaître, s’intensifier, prendre des couleurs nouvelles, plus vraies, plus profondes, grâce à une concentration désormais plus élevée d’androgènes dans le corps.
Quelques conseils pour retrouver ou conserver sa vitalité sexuelle:
- Se rappeler que le plaisir est le meilleur moyen de cultiver le désir.
- Faire de l’exercice, le meilleur catalyseur de l’énergie sexuelle. La méthode de Sex-Yoga est un stimulant idéal.
- Adopter une alimentation riche en acides gras essentiels (huile de lin, de poisson, d’onagre, de bourrache, etc.) ce qui favorise la circulation des endorphines.
- S’assurer d’une alimentation riche en phytoestrogènes qui régularisent, nourrissent et stimulent les pulsions sexuelles.
- Prendre de l’avoine fleurie pour nourrir et assouplir les tissus vaginaux et stimuler la lubrification du vagin.
- Utiliser des lubrifiants naturels comme la vitamine e liquide, l’huile de calendula, l’onguent de consoude, l’huile de lin ou d’onagre, le gel d’igname sauvage.
Nos meilleures alliées
Chaque femme est unique. On doit aborder la ménopause avec une vision globale et individualisée. En prétendant corriger nos malaises seulement par les hormones, on oublie qu’ils sont liés à bien d’autres facteurs qu’on doit corriger à la base: prendre plus de temps pour soi, incorporer dans son quotidien des aliments nourrissants, pratiquer la danse, le yoga ou le tai-chi, et minimiser le stress familial et social. Cette période d’anarchie hormonale nous prédispose à une intensification de nos malaises chroniques accumulés, qu’on confond bien souvent avec les symptômes de la ménopause. L’impact global d’une prescription homéopathique bien individualisée sera très bénéfique pour mobiliser nos ressources.
À la ménopause, la nature a prévu un merveilleux mécanisme pour remplacer la baisse des sécrétions ovariennes: les surrénales, appuyées par le foie et les cellules adipeuses prennent la relève; la stratégie indispensable pour une ménopause en santé est de les soutenir parce que, chez bien des femmes, ces fonctions sont épuisées par la pollution, le stress et une mauvaise hygiène de vie. Pour y remédier, les plantes médicinales seront nos meilleures alliées.
- Pour les surrénales: l’ortie, l’astragale, la réglisse, le ginseng;
- Pour le foie: le chardon-marie, le pissenlit, la bardane;
- Pour le système nerveux: l’avoine fleurie, le millepertuis, le kava, la valériane;
- Pour une présence suffisante d’enzymes dans l’intestin, afin de transformer efficacement les aliments en substances hormonales: le yogourt nature bio, le kéfir, les bactéries lactiques ou probiotiques.
Les phytohormones (ou hormones végétales)
Les phytohormones sont des substances végétales dont les structures moléculaires sont semblables à celles des hormones humaines, ce qui leur permet de sinsérer à leur place dans nos récepteurs hormonaux pour y exercer une influence similaire ou inhibitrice, selon nos besoins. Certains types de phytohormones agissent en tant que régulateurs des sécrétions de lhypothalamus et de lhypophyse qui, à leur tour, régissent léquilibre hormonal. Mais les phyto-hormones les plus importantes pour les femmes sont les phytoestrogènes, car ces dernières se fixent aux récepteurs doestrogènes comme une clé dans une serrure. Leur fonction est double: sil y a carence doestrogènes, elles peuvent satisfaire les besoins hormonaux; sil y a surproduction, elles neutralisent les oestrogènes en les empêchant de prendre place sur les récepteurs quelles occupent.
Les phytoestrogènes nous protègent donc non seulement contre les risques de carence hormonale mais encore plus contre ceux associés à la production excessive doestrogènes. Un tel surplus peut en effet causer de graves problèmes gynécologiques: endométrioses, kystes, cancers du sein ou des ovaires. Même sur de telles pathologies, les phytohormones ont un effet bénéfique, en rééquilibrant notre système hormonal, elles préviennent aussi lostéoporose. Malgré leur efficacité, elles ne contiennent quun faible pourcentage dhormones; elles sont donc sans impact indésiré sur les maladies rattachées à la production doestrogènes.
Comme élément clé dune stratégie de support à la ménopause ou comme mesure de sevrage et de remplacement de lhormonothérapie traditionnelle, les phytohormones sont en train de faire une vraie révolution. À tel point que, dans des pays comme lAllemagne, on a presque abandonné la prescription dhormones synthétiques. On parle actuellement des phytohormones comme sil sagissait dune découverte. Leur existence est pourtant connue et leur usage validé depuis des siècles par des millions de femmes à travers le monde, qui attestent de leur efficacité pour beaucoup de symptômes associés à la ménopause.
Les plantes riches en phytohormones et leur indication
Les phytohormones alimentaires peuvent être prises indéfiniment puisqu’elles font partie d’une saine alimentation. Quant à celles d’appoint, c’est-à-dire que l’on prend pour atténuer un symptôme en particulier, la durée du traitement pourra varier selon la plante utilisée et l’état de santé de la personne. Règle générale, quand le symptôme est disparu, on peut arrêter le traitement, évaluer ses réactions et recommencer au besoin. On peut alterner entre certaines plantes ou les combiner, sans oublier de respecter les contre-indications.
• L’actée à grappes noires (Cimicifuga racemosa)
L’actée, originaire de l’Ontario, est sans contredit la plante dont les applications pour la ménopause ont été les plus étudiées et les mieux documentées. En Allemagne, elle fait l’objet d’une prescription médicale de routine pour atténuer les bouffées de chaleur, les sueurs, la sécheresse et l’atrophie vaginale, diminuer l’insomnie, la nervosité et la dépression associées à la ménopause. On la prescrit aussi dans les cas d’hystérectomie et on croit qu’elle pourrait être efficace dans la prévention et la réduction de l’ostéoporose.
Les phytohormones de l’actée à grappes noires sont reconnues comme étant au moins aussi efficaces, et souvent plus, que les hormones synthétiques, le tout sans effets secondaires statistiquement signifiants. Et il n’existe aucune contre-indication pour les personnes ayant un fibrome, souffrant d’endométriose ou d’un cancer (du sein ou de l’utérus) ou ayant des antécédents semblables.
L’actée a la particularité d’être une régulatrice hormonale.
Les Amérindiennes connaissent ce rhizome depuis plus de 10000 ans et lutilisent notamment pour régulariser le cycle menstruel mais aussi comme antispasmodique pour calmer les crampes menstruelles et les douleurs de laccouchement. Ces «femmes sages» nous ont aussi initiées à ses autres propriétés médicinales; anti-inflammatoire, sédative, anodine (qui réduit les douleurs), hypoglycémiante, expectorante et hypotensive.
Posologie: Comme pour toutes les plantes médicinales, les quantités à prendre varient selon la personne.En général, en extrait sec, on en ingère 600 mg par jour.
En teinture et en extraits liquides, tout dépend de la concentration. En dilution homéopathique, elle est indiquée pour traiter toute la sphère endocrino-génitale et l’hyperémotivité.
Contre-indications: Attention! L’actée est un tonique utérin. À éviter durant la grossesse (sauf durant les dernières semaines) et l’allaitement.
• Le trèfle rouge (Trifolium pratense)
Le trèfle rouge de nos champs contient la phytohormone la plus puissante, le coumestrol. Cela nous le rend précieux pour traiter tous les symptômes de la ménopause et tous les problèmes gynécologiques liés aussi bien au manque qu’aux surplus d’oestrogènes: troubles menstruels, endométriose, kystes ovariens, cancer du sein, etc.
En plus du coumestrol, le trèfle contient des antioxydants réputés pour leur activité anticancéreuse. Le trèfle est aussi très connu comme purificateur du sang et de la lymphe. On comprend pourquoi il devient de première indication contre le cancer du sein: on le prend en prévention mais aussi pour les cas déclarés, en infusion ou en capsules, de même qu’à l’externe en décoctions de fleurs concentrées sur les lésions.
Posologie: En capsules, ingérer 300 mg par jour; en infusion de fleurs, boire à volonté.
On peut aussi manger les fleurs fraîches. (Noter que le feuillage est très concentré en principes actifs).
• Le vitex (Agnus castus)
Le vitex, ou gattilier, est le meilleur régulateur connu des sécrétions de l’hypophdométriose. Le vitex est aussi indiqué dès la puberté pour contrer l’aménorrhée, régulariser les cycles, atténuer le syndrome prémenstruel, rétablir la fertilité et favoyse et de l’hypothalamus qui régissent tout notre système hormonal. Il est particulièrement utile en début de ménopause pour harmoniser les cycles déstabilisés, diminuer les saignements anarchiques, atténuer les bouffées de chaleur, l’anxiété et la dépression, et prévenir l’enriser la lactation. Il aurait un effet bénéfique sur la libido.
Posologie: Le vitex étant lent à agir, on recommande une prise quotidienne ininterrompue d’au moins six mois, en continuant pendant deux mois après amélioration.
Les résultats apparaissent lentement à partir du quatrième mois. On le prend une demi-heure avant le repas du matin, généralement en une seule dose.
En teinture ou en extrait liquide, ingérer de 30 à 60 gouttes par jour. En capsules, 250 mg par jour.
Contre-indications: À éviter pendant la grossesse de même que si on prend des contraceptifs, de la progestérone ou toute hormone synthétique.
Un article tiré du
(édition septembre 1999).