L'origine de nos maux

par Mona Hébert, homéopathe, naturopathe, herboriste

 

D’où viennent nos maladies? De désordres biochimiques, de virus, de bactéries ? Pourquoi les voit-on si souvent réapparaître, plus tenaces et persistantes que jamais ? L’homéopathie répond à ce questionnement par la théorie des miasmes.

Tout se passe comme si les médicaments allopathiques n’arrivaient pas à neutraliser les racines profondes des maladies. En fait, à force de tenter de les éliminer avec des substances toujours plus toxiques, on ne parvient qu’à supprimer quelques-unes de leurs expressions superficielles. Nos maladies deviennent chroniques (récidivantes et dégénératives), car nous hypothéquons constamment nos réserves d’énergie vitale. Quelque chose se cache sous les couches apparentes de nos maux. Samuel Hahnemann, le fondateur de l’homéopathie, en était convaincu. Il y a 200 ans, il nomma «miasmes» ces «patterns énergétiques» à l’origine de l’ensemble de nos maladies chroniques. Il identifia alors trois miasmes fondamentaux engendrés par des traitements inappropriés et superficiels de maladies contagieuses : la psore (issue de la gale), la sycose (issue de la gonorrhée) et la luèse (issue de la syphilis). Ces miasmes se combinent entre eux, s’aggravent, se compliquent et se transmettent de génération en génération.

Cette théorie des miasmes reste jusqu’à ce jour la seule explication scientifique cohérente à la récurrence obstinée et à la transmission de maladies toujours plus nombreuses et pernicieuses. En comprenant la nature des miasmes, leurs manifestations et leur développement, nous pouvons découvrir les racines profondes de nos problèmes de santé.

 CATALYSEURS D’ÉNERGIE

 Les pharaons de l’Égypte ancienne savaient déjà que la maladie dépasse la notion d’une simple sensibilité à des substances pathogènes. Selon eux, pour rester en santé, il fallait respecter les lois de la nature et, surtout, celles de sa propre nature. Cette vision de la santé se prolonge aujourd’hui dans l’approche miasmatique homéopathique, qui nous révèle la symbiose existant entre l’état d’âme et la santé du corps. Nous avons ainsi l’occasion d’agir consciemment et efficacement pour détruire les vraies racines de nos maladies. L’observation clinique a permis d’associer à chacun des miasmes des signes physiques et des états d’esprit caractéristiques. Pour nous libérer de nos blocages et faire reculer nos frontières intérieures, l’homéopathie utilise donc des remèdes spécifiques: les «anti-miasmatiques». Ces remèdes individualisés agissent comme des catalyseurs.

LA PSORE

La psore, c’est le miasme fondamental, la faille énergétique originelle, la prédisposition de base aux nombreuses maladies de l’humanité. En effet, les premières maladies chroniques affectaient la peau. Elles n’ont pas cessé de se compliquer depuis, pénétrant progressivement à l’intérieur de l’organisme pour atteindre la cellule, l’infiniment petit. Les maladies auto-immunes d’aujourd’hui illustrent bien cette évolution.

La psore est née de la suppression des maladies de la peau, ou plutôt de la tentative de les éliminer par des médications inappropriées. En apparence, la maladie semble guérie, mais, en réalité, on n’en a pas détruit la racine. Les nombreux cas d’eczéma infantile suivis d’asthme quelques années plus tard en sont un bon exemple.

Les maladies dites psoriques consistent au départ en des éruptions cutanées accompagnées de démangeaisons. Elles se compliquent chez la personne qui en est atteinte ou chez ses descendants et peuvent générer une grande diversité de réactions organiques, en réponse à des agressions externes comme les abus ou carences alimentaires, les passions désordonnées, le climat, l’hérédité, etc. Ces dérèglements touchent l’ensemble des organes et de leurs fonctions. Ils peuvent se traduire par exemple par des affections cutanées, des désordres nerveux, mentaux, sensoriels, digestifs, respiratoires, hépatiques, etc.

Progressivement, l’organisme s’épuise. Il devient de plus en plus vulnérable aux attaques multiformes de la psore. Ce combat entre nos forces de santé et ce karma pathologique est l’écho d’un état psychique psorique bien particulier. Au centre même de la condition humaine, la psore s’exprime par une lutte pour la survie dont le moteur est le désir. Pour faire face aux stress extérieurs, réels ou appréhendés, la psore génère en effet un sentiment d’anxiété ou la peur de perdre quelque chose. Elle crée alors la nécessité de lutter pour retrouver cette chose.

Dans cet état, on envie le destin de l’autre et on doute de ses propres capacités de réussite. Entre l’ego et le monde se niche une tension intérieure qui invite la maladie. Ce sentiment de désir et d’insatisfaction ressemble à celui qu’on éprouve vis-à-vis du fruit défendu, du paradis perdu. La psore nous parle de nos attentes, de cet idéal démesuré qui nous ronge quand nous ne respectons pas nos besoins réels ou que nous nions notre identité profonde.

LA SYCOSE

Le syndrome sycotique prend racine dans la tentative de suppression des symptômes de la gonorrhée. La sycose nous est transmise par un contact sexuel direct ou de façon héréditaire. L’influence sycotique catalyse les effets des maladies psoriques, ajoutant de ce fait à leur morbidité. Elle induit une déficience des réactions métaboliques, un affaiblissement du pouvoir immunitaire qui s’exprime paradoxalement par de l’hypersécrétion et une tendance à l’hyperplasie et aux excroissances de toutes sortes. C’est comme si l’organisme, pour compenser le déséquilibre, en faisait trop : allergies, infections de nature oto-rhino-laryngologique, kystes, fibromes, verrues, condylomes, etc. Les maladies psoriques s’aggravent par la contamination sycotique, et le pronostic devient de plus en plus incertain à mesure que la force vitale épuise ses ressources.

Au plan psychoémotif, l’impact sycotique est semblable à ce qui agresse le corps. Sous l’influence de la sycose, la personne a la conviction, consciente ou refoulée qu’elle ne peut gagner la bataille de la vie. Elle se sent incapable de réussir, et son souci permanent consiste à éviter les situations susceptibles de révéler ses inaptitudes. Elle veut à tout prix cacher sa faiblesse, aux autres comme à elle-même. Elle développe des stratégies parfois très subtiles et complexes pour camoufler son profond sentiment d’insécurité. Elle devient manipulatrice, obstinée ou dictatoriale pour camoufler ou faussement combler son vide extérieur. Elle devient également obsessive; elle a honte de son échec, se sent coupable de ne pas s’être servie de tout son potentiel et d’avoir abandonné son idéal. Elle veut garder secrète sa décadence; elle cherche à sauver les apparences et à s’ajuster à sa propre faiblesse plutôt qu’au monde.

LA LUÈSE

Le miasme luétique provient d’un traitement, chez soi ou ses ancêtres, qui n’a éliminé que les symptômes externes d’une syphilis sans s’attaquer à sa dimension cachée et transmissible. Ce miasme, comme les autres, ne transmet pas les symptômes primaires de la maladie, mais bien la programmation à développer un ensemble de tendances pathologiques caractéristiques. La luèse est le miasme le plus néfaste qui soit. Son action est si intense, profonde et complète que nos mécanismes de défense s’avouent impuissants à la surmonter. Les atteintes pathologiques impliquent des dégénérescences physiques, nerveuses et mentales, la destruction des tissus superficiels et profonds et des dommages irréversibles aux organes essentiels. Ce miasme provoque une dégradation fatale sur un terrain déjà miné par la psore et la sycose; il entraîne des ulcères, une destruction des cellules nerveuses, des attaques auto-immunologiques, des pathologies cardiaques, etc. Les maladies redevables à la luèse se confondent avec celles qui comblent les pages des rubriques nécrologiques: Alzheimer, sida, etc.

Le psychisme luétique est tout aussi extrême et pessimiste. Si la psore permettait de lutter et si la sycose offrait des moyens de compenser, la luèse ne présente aucune solution. Cette fois, on a la certitude que tout est perdu. Toutes les ressources sont épuisées; il n’y a plus aucun espoir, plus de but, de sens. On ne peut s’ajuster à une situation aussi tragique. Il n’y a plus de honte à cacher, plus de culpabilité, car on a perdu tout sens moral, jusqu’au souvenir de ses aspirations anciennes. Seule subsiste une impulsion violente de tout détruire, y compris soimême. Les gestes extrêmes associés à la folie, les agressions de tout ordre de même que les pulsions suicidaires sont typiquement luétiques.

MIASMES MODERNES

 Depuis Hahnemann, d’autres homéopathes ont postulé l’existence de nombreux miasmes, comme la tuberculose, le cancer ou la malaria. Ils avancent l’hypothèse de la création de miasmes modernes par l’homme, à travers l’utilisation des vaccins, des hormones synthétiques et de la radioactivité. Verrons-nous bientôt apparaître un miasme lié à la consommation d’OGM? Les dynamiques miasmatiques façonnent notre santé parce qu’elles s’inscrivent dans les profondeurs méconnues de la nature humaine. C’est à ce niveau, là où se créent les liens de cause à effet entre le corps et l’esprit, la santé et la maladie, la vie et la mort, qu’agissent les remèdes homéopathiques. Prescrits avec compétence, dans une optique anti-miasmatique, ils peuvent nous affranchir de ces chaînes morbides insoupçonnées qui accablent notre corps et freinent notre liberté.

Cet article est tiré du livre « La Médecine des femmes » de Mona Hébert, publié au Editions du Roseau (2003).